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15/11/2005

Les invasions barbares

Blottis dernière nos douves qui portent le nom de Périphérique, nous assistons depuis bientôt 3 semaines à l'embrasement de ces contrées pas si lointaines que sont les banlieues. Regards ébahis devant ces téléviseurs remplis de flammes, ces journaux ne représentant que des cendres.

Interrogations aussi sur les solutions à apporter: quelle dose de prévention? quelle dose de répression? Alors que ces émeutes sont la démonstration flagrante du refus de toute autorité ---qu'elle se matérialise sous la forme de l'état, d'écoles qui brûlent ou d'entreprises réduites en cendres---, comment ne pas s'étonner que la plus élémentaire des autorités ne trouve pas sa fonction ? Cette autorité auquelle ces "jeunes" devrait se référer systématiquement est leur famille. Pourtant le goût de l'autorité pourrait être redonné à des parents ne se souciant guère actuellement de savoir si leurs enfants de 13,14 ou 15 ans sont bien à la maison pendant la nuit: une coercition basée sur la suspension d'allocations pendant un laps de temps court mais dissuasif lorsque les jeunes sont appréhendés en train de commettre des actes délictueux.

Le gôut de l'autorité serait alors vite retrouvé, sans une escalade de violence, avec fermeté mais aussi avec confiance dans ces familles et une responsabilisation de ces "jeunes" envers leur parents.

Pour preuve que le 14e n'est pas à l'abri, 3 voitures avenue de la porte de Châtillon (14e) ont brulées cet été, certainement dans un moment d'oisiveté insoutenable ...

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Commentaires

Une analyse pertiente qui est tout à fait d'actualité

Elle montre les deux visions primaires de la réalité (mais faciles à comprendre) et les "solutions" correspondantes qui viennent alors à ... l'impulsion (ne parlons pas d'esprit) de ceux chez qui ces visions l'emportent sur la réflexion.

--------------------------- L'enfant agressif (tome 1) -------------------------------
« L’ennui est que nous n’en savons pas assez sur la haine.
En conséquence, nous ne la prenons pas assez au sérieux.
Considérez, par exemple, la question de la délinquance juvénile aux Etats-Unis à l’heure où nous écrivons. L’opinion publique pratique la « politique de l’autruche », plus encore qu’elle ne l’avait fait pour des sujets comme la tuberculose ou les maladies vénériennes.

La syphilis est devenue une maladie comme une autre. Nous avons séparé le dégoût moral provoqué par les conditions dans lesquelles elle est contractée du problème de la guérison. Nous avons laissé au prédicateur, au professeur, à l’éducateur de la santé publique le soin de s’occuper du rôle moral de la question. Le médecin approchera la personne atteinte avec toute l’objectivité qu’on peut attendre du sérieux médical.
Tous les sentiments de honte, d’embarras et de culpabilité que le public attachait originellement à cette maladie sont maintenant réservés au fait que nous ne connaissons pas toutes les réponses au problème de la prévention, que les mesures préventives et curatives, même quand elles sont connues et utilisées, ne sont pas toujours assez vite accessibles et assez bon marché dans toutes les communautés.

En ce qui concerne la délinquance juvénile, nous n’en sommes pas arrivés à un stade aussi éclairé. Nous ne la prenons pas assez au sérieux.
Considérons un crime particulièrement choquant, par exemple celui d’un adolescent, délinquant sexuel, qui tue un enfant plus jeune, pas tout à fait de sang froid, mais dans une crise de panique et sans ce soucier réellement de la victime.
Quelle est la réaction générale du fidèle lecteur des journaux qui rendent compte, d’une manière incomplète et habituellement déformée d’un crime comme celui-là ?
Elle oscille généralement entre deux extrêmes.
Le lecteur est d’abord choqué comme il se doit ; il espère qu’on trouvera bientôt le criminel, qu’il aura ce qu’il mérite et qu’on le mettra en sûreté là où il ne pourra plus faire de mal.
Ce pourrait être une bonne occasion aussi, pense-t-il, pour réduire les frais du budget de la maison de correction locale et pour admonester le superintendant de l’école afin qu’il veille à ce que les trois « R »* soient enseignés convenablement, plutôt que de gâter ces jeunes par toutes sortes d’absurdités baroques, comme des loisirs organisés et des groupes de discussion de type familial, et tout ce qui s’ensuit.
On peut aussi juger nécessaire de dépense une somme considérable pour que les institutions de l’Etat comptent quelques « chambres fortes » de plus.
Cela règle le problème pour un moment.

L’autre réaction se manifeste de manière naïve et sentimentale. Le lecteur d’un tel fait divers peut se souvenir de ce qu’il a tiré d’un roman récent, ou d’un film où la psychiatrie est vaguement évoquée, ou du discours de l’autre jour au local de l’Association des Parents et Maîtres. En conséquence, il verse de chaudes larmes sur les pages racontant le cas du délinquant.
Voyez, il n’a jamais eu de chance, pauvre gosse ! La façon dont il a été élevé ! Car après tout, qui est à blâmer, sinon les parents et l’école ? Il n’a pas assez lu la bible ou l’a trop lue !
… Et peut-être que l’on devrait prendre la peine de distribuer quelques ballons de football de plus dans ce vilain quartier, et pourrait-on envoyer des rideaux neufs à la maison de redressement, après tout.
Ou peut-être pourrait-on suggérer qu’on envoie en prison les parents des délinquants au lieu de leurs enfants, ou au moins qu’on les « force » à suivre des cours sur l’éducation à donner aux enfants.

En résumé, l’attitude des contribuables envers de telles questions est assez pitoyable à considérer. Ou bien nous nous durcissons, et avons recours aux défenses les plus démodées et les plus visiblement stupides contre la honte, l’anxiété et la culpabilité, ou bien nous devenons sentimentaux et pleins d’illusions quand nous considérons la malheureuse chaîne d’évènements qui conduit à un crime comme celui-là.

Sur deux points, disons le en passant, les deux camps sont d’accord.
D’abord, il faudrait « donner bientôt une solution » à ces problèmes.
Ensuite une telle solution devrait « être simple et pas chère ».
Car qui, même mieux informé, oserait se rallier publiquement à l’idée d’une cotisation élevée destinée aux mesures préventives et curatives ?

Nous pensons qu’il est temps pour la communauté de s’éveiller à des faits vitaux. La délinquance, et particulièrement le phénomène de la haine, invariablement en cause dans les crimes les plus graves est une chose sérieuse.
Nous n’en savons pas assez sur le sujet, et nous devons en apprendre davantage.
Il ne convient pas de gâter le délinquant en considérant comme « astucieuses » ses escapades mineures jusqu’à ce que vienne le jour où le volume de haine accumulé éclate dans une destruction sans frein.
il ne convient pas davantage de le mettre en prison, de l’envoyer d’audience en audience, afin que le public ait sa représentation et soit assuré « qu’on fait quelque chose » bercé de l’illusion que la prison ou les soins dans une quelconque institution de redressement résolvent le problème.

En fin de compte, cela revient à dire que notre civilisation est devenue trop policée et trop décente pour recourir à la grossière mesure qui consisterait à détruire ou à isoler l’individu qui ne s’y adapte pas. Malheureusement, elle ne semble pas encore assez sage, ou capable du nécessaire courage financier pour franchir les degrés qui conduiraient à la guérison. »


* «R»eadind, w«R»ritting, a«R»ithmétic : lire, écrire et compter.

Fritz Redl et David Wineman « L’enfant agressif » (Tome 1 « Le moi désorganisé »)

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Apparemment, ceux qui gèrent les problèmes actuels relatifs aux émeutes que nous avons connus ces dernières semaines, ont choisi l’option que les auteurs décrivent comme illusoire et inefficace sur le long terme.
Pire même, plus de cinquante années après cette analyse, certains hommes politiques, en France mais aussi dans beaucoup d’autres pays dits civilisés, se tournent à nouveau vers ce que Fritz et Wineman considéraient comme des solutions (barbares) d’un autre temps à savoir celles qui retirent au délinquant (considéré parfois comme « terroriste » de manière à pouvoir lui appliquer un régime d’exception) ses droits de citoyen du monde et lui font subir des sévices psychologiques et physiques d’un autre temps.

Écrit par : Luc Comeau-Montasse | 17/11/2005